UN FRENCHIE AUX 200 MILES DE DAYTONA

17 mars 2016

"Il y a quelques semaines, j’ai reçu un coup de fil surprenant. Un team Américain, me propose de participer aux 200 Miles de Daytona. Cette épreuve mythique se court maintenant sur des 600cc et c’est l’équipe qui a gagné l’an dernier avec l’Américain Danny Eslick qui m’a contacté. Cette proposition est une très bonne opportunité !"

 

Un peu d’histoire : DAYTONA est un circuit principalement dédié aux courses de Nascar. La partie principale de ce circuit est donc un anneau dont les virages sont relevés de 32°. Les courses de moto emprunte en grande partie l’anneau entrecoupé d’une chicane dans l’une des lignes droites et d’une partie constituée de 5 virages qui emmènent jusqu’au banking. Cette course doit sa réputation aux nombreux pilotes de Grand-Prix qui y participaient afin de se préparer à la saison à venir dans les années 80. Puis elle était l’épreuve phare du championnat Américain, avant d’être une épreuve indépendante depuis quelques années.

Cette année c’est la 75ème édition des 200 Miles de Daytona.

 

"Le point négatif c’est que je n’ai pu anticiper de séances d’essais pour me préparer à cette course et que les deux jours prévus à Aragon il y a quelques semaines se sont révélés très peu efficaces en raison de la météo. C’est ainsi que je débarque aux Etats Unis sur un tracé très particulier, sur une moto différente (même si c’est une 600 GSX-R, elle est relativement différente de la mienne), avec des pneus que je n’ai pas l’habitude d’utiliser. En bref, les quelques séances avant la course seront utiles et j’ai plutôt intérêt à bien les exploiter !"

 

1er jour : Deux séances au programme.

Je m’élance sur le circuit et déjà je suis surpris par le bitume extrêmement bosselé et avec des raccords en résine qui traversent la piste de part et d’autre ! Ma surprise ne s’arrêtera pas là, en effet le dernier virage de l’enfield est encore pire que le reste, deux grosses bosses à l’entrée avec d’énormes raccords glissants. Ce virage à gauche est matérialisé par un vibreur intérieur à l’entrée puis des gros barils jaunes pour contraindre les motos à s’élargir avant de monter sur le Banking ! Et parlons en de ce banking, incliné de 32° (équivalent à une piste rouge au ski), la 1ère entrée ressemble davantage à se jeter contre un mur plutôt qu’à une ligne droite. J’en viens à me demander comment il est possible de ne pas tomber en « montant en haut » de la piste ! Je reste bien sagement « en bas » me gardant bien de mettre à fond mais en essayant d’avoir un minimum de vitesse pour garder l’adhérence. Ok ça c’est fait, la deuxième entrée au bout d’une très longue ligne droite entrecoupée d’une chicane est à peine moins impressionante, même si je m’efforce de garder les gaz et me permet de monter à la moitié du mur. Il me faudra tout de même 3 ou 4 tours avant de ne pas couper les gaz sur le banking. Avec des tours avoisinants les 2min, la séance passe en un éclair et je n’ai toujours pas compris toutes les trajectoires du tracé quand elle se termine. Je suis 12ème de cette 1ère séance en 1’58.

Après avoir discuté avec Danny Eslick (3 fois vainqueur ici), j’améliore certains passages et améliore mes chronos également. Je commence à prendre plaisir dans le banking, mais certaines parties de l’enfield et la chicane me posent toujours de gros problèmes. Les trajectoires ne sont pas du tout habituelles, car il faut jouer avec les bosses, les raccords et la forme des virages un peu étrange… J’améliore largement mon chrono (1’55’’6) mais suis 13ème de la séance."

 

Jour n°2 : déjà les qualifications

"Une séance de 25min avant les qualifications qui se passe plutôt bien puisque j’améliore encore de plus d’une seconde (1’54’’2) et prends la 7ème place, ce qui est de bonne augure pour la qualif. Les sensations commencent à venir et je me fais vraiment plaisir sur l’ensemble du tracé (mis à part un ou deux virages où je serre encore les fesses tant ils sont bosselés). J’ai encore à travailler les sorties des virages qui commandent le banking car j’y perds beaucoup de temps.

Pour la 1ère séance qualif de 50min, je m’élance en pneus usés afin de profiter d’une belle amélioration au passage des pneus neufs ! Souvent gêné par des concurrents, je décide de faire un tour supplémentaire… Je suis sur un bon rythme, mais comme souvent c’est le tour de trop. Au freinage, en passant sur un raccord, je perds l’avant et sans avoir le temps de réagir je me retrouve à terre. Je ne peux pas finir la séance et termine la qualif en 15ème position en 1’55’’2. Très déçu, je peux m’en prendre qu’à moi-même car j’ai fais l’erreur de ne pas faire attention à là où je posais mes roues ! Cela m' handicape énormément car je perds 30min d’essais qui me sont pourtant vraiment nécessaires !

Il reste tout de même une deuxième séance qualif mais de 25min seulement. Je m’élance et essaye de prendre un bon rythme immédiatement. J’améliore progressivement et entre dans le top 10 avec un chrono de 1’53’’5. Pour progresser davantage, je dois prendre une aspi car sur ce circuit on peut gagner 1 à 2 secondes grâce à ce phénomène et jusque là j’ai quasiment toujours roulé tout seul ! Malheureusement personne à l’horizon et au final mon chrono me positionne 12ème sur la grille. Ce n’est pas si mal au vu des circonstances, même si j’espérais mieux. Pour ce qui est de la course tout est possible, car avec un bon départ et le jeu des aspis, je peux accrocher le groupe de tête."

 

Warm-up et course

"Au warm-up, je roule presque aussi vite qu’aux qualifs, ce qui me place encore une fois dans le top 10, je suis donc plutôt confiant pour la course.

Le départ de la course est un peu bizarre ici. On part de la voie des stands, où l’on arrive dans le 1er virage avec une position inhabituelle. Le départ est donné au drapeau vert et non avec des feux. Enfin la démultiplication très longue de la moto rend le départ un peu compliqué !

Malgré tout, je réalise un départ et un 1er virage correct. Je suis 13ème dans le 1er tour. Les motos des deux qui me précède sont des vrais avions de chasse. Je reviens dans l’enfiel, mais dès que le banking arrive, ils me prennent une distance folle. J’arrive malgré tout à dépasser la Ducati à l’entrée du second tour. Devant moi il y a déjà pas mal d’écart. La Ducat’ me redouble dans la ligne droite et je la repasse à l’entrée de la chicane. Mais quand je balance la moto à droite, l’avant part d’un coup sans que je comprenne pourquoi. Devant moi un autre pilote est à terre également. Il vient me voir pour me dire que le pilote devant lui (Cory West) perdait de l’huile ! Ce pilote d’ailleurs s’arrêtera dans la ligne droite suivante, moteur cassé ! Le mal est fait, je ne peux repartir et reviens aux stands en camion. Le team m’annonce que nous sommes autorisés à prendre la deuxième moto. Impensable pour moi d’abandonner là donc bien que je perde 15 tours sur les 57 prévus, je souhaite terminer la course. La fin de la course est donc sans saveur, sur une moto dont les réglages sont totalement différents, mais petit à petit je prends un rythme correct (1’54) et vois le drapeau à damier au terme de 38 tours de course."

 

Bilan :

Bien sûr le bilan est mitigé, mais je dois retenir le positif. Ce fût une expérience incroyable sur un circuit impressionant, tant par sa taille, que par ses difficultés.

J’ai rencontré une autre culture de la moto complètement différente et vécu une aventure humaine extrêmement enrichissante. Le team a été vraiment génial avec moi ne cessant de m’encourager et de me féliciter. Ils ne s’attendaient pas que je rentre si facilement dans le top 10 et tout les gens sur places, du speaker aux pilotes et organisateurs ont été vraiment chaleureux et enthousiastes !

Pour ma part, je savais que ça allait être compliqué étant donné que je n’avais quasiment pas roulé en 6mois. La plupart des pilotes là bas ont fait au moins un week-end de course en Floride avant la course et sont arrivés avec un certain rythme sur un circuit qu’ils connaissent très bien. J’ai essayé de progresser pas à pas sans me précipiter et malgré ça j’ai commis une erreur en qualification qui m’a coûté beaucoup de temps d’essais. En course j’ai manqué de chance, mais c’est la loi de la course qui est parfois un peu dure ! Mais qui sait, j’aurais peut-être un jour l’occasion de me rattrapper !

En attendant je vais finir ma préparation pour ma saison de vitesse qui s’annonce très intense et j’ai déjà hâte d’être à la prochaine séance d’essais sur le circuit d’Alméria.

 

Un grand Merci à tout le team TOBC (Michelle, Bobby, Timmy, Philip, Franck, Kelsey, Mick, Scott, Suzan, Robin, etc.) de m’avoir permis de réaliser cette expérience formidable et pour leur accueil plus que chaleureux."